Publier ses émissions de gaz à effet de serre ne relève plus d’un choix militant ou d’une posture vertueuse. Depuis la loi Grenelle II de 2010, certaines entreprises françaises sont tenues de réaliser un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre. L’obligation s’applique aux structures de plus de 500 salariés, aux établissements publics de plus de 250 agents et aux collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants.Les sanctions en cas de non-respect restent peu appliquées, bien qu’une amende soit prévue. Malgré ce cadre légal, de nombreuses entreprises échappent encore à ce dispositif, tandis que les exigences européennes évoluent et renforcent progressivement le champ des obligations.
Le bilan carbone en entreprise : définition et enjeux concrets
Le bilan carbone en entreprise, c’est avant tout une évaluation des émissions de gaz à effet de serre générées par l’ensemble des activités d’une organisation sur une période donnée. Ce calcul s’appuie sur la méthode bilan carbone développée en France par l’association pour la transition écologique. L’analyse distingue plusieurs catégories, appelées scopes, pour cerner la réalité des émissions.
Pour comprendre l’étendue du bilan carbone, il faut connaître les grands types d’émissions généralement retenues :
- Scope 1 : toutes les émissions directes générées par des sources détenues ou contrôlées par l’entreprise, comme la combustion de carburants sur site ou certains procédés industriels.
- Scope 2 : les émissions indirectes liées à l’achat d’électricité, de chaleur ou de vapeur.
- Scope 3 : une catégorie très large rassemblant toutes les autres émissions indirectes, comme le transport de marchandises, les déplacements professionnels, l’achat de biens et services, la gestion des déchets, etc.
Les entreprises commencent à prendre la mesure de cette obligation. Calculer son empreinte carbone, c’est disposer d’une image claire de l’impact réel de ses opérations. Plusieurs raisons poussent à cette démarche : conformité à la loi, anticipation de la directive CSRD, engagement dans la transition écologique. Pour certains groupes, la réduction des émissions devient un argument commercial et un levier de performance.
Les attentes évoluent rapidement. Clients, investisseurs, collaborateurs et fournisseurs scrutent désormais l’empreinte carbone de l’entreprise et la cohérence de ses engagements climat. Pour obtenir un bilan carbone solide, il faut s’appuyer sur une méthode claire et une collecte de données sérieuse. Négliger des sources d’émissions, en particulier celles du scope des émissions indirectes, fausse le diagnostic dès le départ.
Obligation du bilan carbone : qui est concerné et que dit la réglementation ?
En France, la réglementation impose la réalisation d’un bilan carbone pour les entreprises franchissant certains seuils d’effectifs ou selon leur statut. Depuis la loi Grenelle II, le bilan GES réglementaire vise toutes les entreprises de plus de 500 salariés en métropole (250 en outre-mer), mais aussi les établissements publics de plus de 250 agents. Les entités de droit public et les collectivités de plus de 50 000 habitants sont elles aussi concernées. Avec l’arrivée de la directive CSRD, le périmètre va rapidement s’élargir : à partir de 2025, de nombreuses sociétés, dont celles cotées ou dépassant deux des trois seuils suivants, devront s’y soumettre :
- 250 salariés
- 40 millions d’euros de chiffre d’affaires
- 20 millions d’euros de total de bilan
Le texte légal précise que le bilan GES doit obligatoirement couvrir les émissions directes (scope 1) et celles liées à la consommation d’énergie (scope 2). Quant au scope 3, plus vaste et complexe, il reste pour l’instant optionnel, mais la dynamique réglementaire pousse les organisations à l’intégrer progressivement. La publication du carbone bilan GES sur la plateforme de l’ADEME doit être réalisée tous les quatre ans (ou tous les trois ans pour le secteur public).
En cas de manquement, la sanction financière peut atteindre 10 000 euros, montant doublé en cas de récidive. Mais le véritable enjeu se joue ailleurs. Le bilan carbone pour les entreprises s’impose aujourd’hui comme une étape incontournable, alors que la transition écologique s’inscrit durablement dans le fonctionnement quotidien.
Quelles sont les étapes clés pour réaliser un bilan carbone fiable et pertinent ?
Mettre en œuvre un bilan carbone en entreprise ne laisse aucune place à l’improvisation. Il s’agit d’avancer par étapes structurées, sans brûler les étapes. Tout commence par la définition du périmètre : quelles entités, activités ou sites doivent être pris en compte ? Le choix du scope (direct, indirect, énergie, chaîne de valeur) est déterminant pour la robustesse du résultat.
Vient ensuite le moment de collecter les données nécessaires : factures d’énergie, données logistiques, achats, déplacements professionnels, informations sur les déchets ou le transport en amont. La qualité des informations recueillies influence directement la fiabilité du calcul bilan carbone. Certaines entreprises choisissent de s’appuyer sur un logiciel de bilan carbone ou de solliciter un cabinet de conseil spécialisé afin d’automatiser et de fiabiliser la démarche.
L’étape décisive consiste à appliquer la méthode bilan carbone développée par l’ADEME, ou à utiliser des outils compatibles. Le calcul se fait poste par poste, puis les résultats sont regroupés par scope. Rigueur et transparence sont de mise : il s’agit d’exposer clairement les hypothèses, les facteurs d’émissions utilisés, et les limites du travail engagé.
Mais un bilan carbone ne se limite pas à une série de chiffres. Il s’agit aussi d’en faire un levier pour bâtir un plan d’action de réduction : éliminer les gaspillages, électrifier certains postes, revoir ses choix de fournisseurs ou réorganiser la logistique. La réduction des émissions s’inscrit dans des actions concrètes, mesurables, et demande un suivi sur la durée. La transition énergétique démarre avec la capacité à connaître et piloter précisément sa propre empreinte.
À mesure que la pression réglementaire s’accentue, le bilan carbone s’impose comme une étape incontournable. Pour beaucoup d’entreprises, il n’est plus question de temporiser : avancer ou rester à la traîne, voilà le vrai choix qui s’impose désormais.


